Les Îles Vierges Britanniques et Saint-Martin
lundi 17 janvier 2011
Quoi de mieux pour commencer l’année que le combo suivant: chaleur, plongée, voile et bonne compagnie? C’est précisément ce que Francis m’a proposé quelques semaines avant le temps des Fêtes. Une courte escapade à bord du voilier de ses parents qui naviguent depuis déjà plusieurs mois du Lac Champlain jusqu’aux Caraïbes. Sans que ce soit un voyage à long terme comme je suis porté à le faire habituellement, ce séjour au chaud aura tout de même eu l’avantage de recharger les batteries, vidées par l’hiver québécois ainsi que mon horaire nocturne (ces 2 derniers me rendant déficitaire en vitamine D). Notre départ a eu lieu le 29 décembre en soirée. Un départ en avion, c’est toujours excitant car on sait qu’un autre pays nous attend derrière les hublots à l’atterrissage mais dans notre cas, c’était partie remise car nous devions passer par Toronto et y patienter un bon 12 heures avant de prendre notre VRAI vol vers le sud! Nous sommes donc arrivés à Sint Maarten Island le lendemain, avec notre bronzage canadien et nos tuques sur la tête. Le comité d’accueil (Brigitte et Michel, les parents de Francis) était au rendez-vous, et ça n’a pris que 10 minutes pour que l’on se retrouve dans leur zodiac en direction de leur voilier, un Caliber 40 pieds, le Sea Kite. J’avais déjà eu la chance de passer un court séjour à bord d’un de leur précédent bateau qui faisait 10 pieds de moins en longueur. La différence se fait voir et ce petit « luxe » est tout à fait justifiable lorsque l’on entreprend de grandes traversées en haute mer. Il y a à bord assez de place pour nous loger tous les quatre, y cuisiner sans peine et amplement d’espace pour profiter du soleil et du vent du large dans le cockpit et sur le pont. Tous les instruments, qu’ils soient pour la navigation, la génération et l’emmagasinage de l’énergie, la plaisance, ou pour le fonctionnement même du bateau, sont savamment disposés et aucun espace n’est perdu. Toute une organisation! Nos premiers jours dans les Caraïbes se sont écoulés alors que nous tentions de profiter au maximum du soleil qu’avait à nous offrir le ciel de Saint-Martin (et aussi à rendre ma grippe canadienne un peu gênée d’exister à une telle latitude). Cette île est divisée en 2 parties, celle du nord est française alors que le sud est sous la juridiction hollandaise (Sint Maarten), avec chacune leur capitale, Marigot et Philipsburg. L’euro et le Netherlands Antilles Guilder sont utilisés dans les 2 parties respectives, mais le dollar américain trouve facilement sa place partout. Même phénomène au niveau des langues parlées; le Français et le Hollandais sont choses courantes mais l’Anglais constitue la base du langage local, auquel l’on doit ajouter le Créole. La côte offre de superbes plages de sable blanc avec une eau bien claire digne des Caraïbes. La population totale de l’île est d’environ 75 000 personnes et les grandes villes ne le sont pas tant que ça. Le tourisme semble attirer beaucoup car on remarque dans les principales agglomérations que magasins et restaurants fleurissent de toute part pour accueillir les immenses paquebots de croisière qui viennent y faire des arrêts. En voyant 3 de ces monstres flottants en même temps débarquer à Philipsburg, avec environ 5000 passagers chacun, la justification de la présence d'autant d’installations touristiques fût validée. De plus, beaucoup de touristes y venaient spécialement pour célébrer le Nouvel An. Nous avons trouvé une plage au nord-est de l’île, Orient Beach, qui allait accueillir 1000 fêtards pour le 31 décembre et nous nous sommes joints à eux pour voir les feux d’artifices qui partaient de petits bateaux aux coups de minuit. Fête bien arrosée mais pas trop: il fallait trouver un taxi pour revenir au zodiac et ensuite trouver le voilier dans la pénombre! À l’exception du premier de l’An, je dirais que nous nous sommes vite synchronisés avec les heures de coucher et de lever du soleil (8:00 pm et 6:00 am). Pour ma part, je dormais toujours à l’extérieur, où je pouvais bien voir les étoiles dans le ciel sans lune, et où les premières lueurs du matin venaient me réveiller tranquillement. Au programme, avant de partir vers les Îles Vierges Britanniques, quelques plongées, dont une avec des requins (black tip sharks) qui variaient de 1,50 m à 2,50 m. Un peu moins de spécimens que l’on s’imaginait au départ mais l’expérience en valait tout de même la peine. Je me suis d’ailleurs fait mordre à quelques reprises par un petit poisson plutôt territorial qui se prenait probablement pour un de ses lointains cousins faisant plus de 100 fois son poids... Autre attraction plutôt unique en son genre : se poster à l'embouchure de la piste du Princess Juliana Airport pour être littéralement dominé par les courants d'air que les jumbos jets projettent derrière eux lors du décollage! Seulement une petite clôture métallique sépare le pavé de la piste des courageux qui bravent le sable qui leur fouette le corps à haute vitesse. Même quelques mètres plus loin, les nageurs qui se croient à l'abri dans l'eau se voient chavirer par ce coup de vent! Pas de mensonge, c'est énorme comme force! Deux bars se sont localisés à proximité (pas directement dans le trajet de la piste, mais chacun de leur côté) et vous informent sur les heures des gros porteurs 747 en vous offrant de vous assoir prendre une bière en les attendant! À essayer si vous n'avez pas peur, et si vos vêtements sont bien accrochés après vous! Une distance de 80 nm (miles nautiques) nous sépare des îles vierges, et par chance pour notre bateau, les vents du nord-est seront dans notre dos et nous pousseront pendant les 12 heures de la traversée. C’est de nuit de nous effectuons ce parcours, question de ne pas perdre une journée, accompagné d'un autre bateau ami, le NaMar avec Nancy et Marcel à bord. À tour de rôle, nous tenions la barre en surveillant constamment les instruments de navigation pour ne pas s’écarter de notre course, avec les longues vagues de plus de 10 pieds qui berçaient les autres qui dormaient. L’absence de lune conservait l’horizon dans la noirceur la plus totale, d’autant plus que le barreur se voyait aveuglé par les instruments dégageant de la lumière, et une autre personne était donc requise dans le cockpit pour scruter l’horizon et détecter tout autre bateau ou obstacle ne figurant pas sur le radar. Un manque d’attention de 5 secondes seulement alors que nous changions de barreur nous a fait monter au vent et le bateau s’est vu faire un 360 degrés sur lui-même, ou du moins, c'est ce que l'on croit (difficile à dire avec aucun point de repère!). L’arrivée à Spanish Town s’est faite à l’aube et nous avons effectué le dédouanage obligatoire. Seconde étape, se rendre à Road Town, la plus grande ville de Tortola Island pour l’approvisionnement des jours à venir. Notre plan est bien simple : plonger dans les meilleurs sites qu’offrent les multiples îles des BVI et pour nous guider, nous avons un livre entièrement dédié à nous les faire découvrir, ainsi que les notes du journal de plongeur que Michel a inscrites en venant plonger au même endroit environ 14 ans plus tôt! On se loue 4 bonbonnes de plongée chacun pour être certain d’avoir assez si les centres de remplissage ne se trouvent pas facilement. Norman Island est notre première destination. Une superbe baie, The Bight, qui nous protège des vents venant toujours du nord-est, abrite aussi plusieurs autres voiliers. Il est spécial de noter que la plupart des plaisanciers à leur bord ont entre 40 et 60 ans, parfois accompagnés de leurs jeunes enfants (moins de 20 ans), et que nous sommes pratiquement les seuls représentants de la vingtaine, qui sont généralement plutôt rares à posséder de tels voiliers. Cela veut dire que nous allons être pratiquement seuls à explorer les récifs en plongée! Nous nous mouillons à quelques reprises durant les 2 jours à suivre. Au menu : raies léopard, tortues, langoustes, requins dormeur, crevettes, éponges, crabes, conques, barracudas, poisson-perroquet... Une plongée nous fait visiter quelques cavernes qui se révèlent plutôt sans intérêt et peu profonde. À son entrée se trouve par contre une autre attraction inattendue : des pélicans survolent le récif et plongent à toute vitesse pour attraper les petits poissons se tenant en banc devant les entrées de grotte. Puisque nous sommes équipés pour rester sous l’eau, nous passons plusieurs minutes à observer les spectaculaires plongeons de ces oiseaux allant parfois jusqu’à 3 ou 4 pieds de profondeur, et ensuite les voir avaler leurs proies. Francis a même été surpris lorsque l’un d’entre eux a plongé tout juste à côté de lui; ils n’ont visiblement pas peur des humains! Nous escaladons un sommet pour attraper le soleil couchant, armés de nos gougounnes et de notre maillot de bain et oublions qu’après le coucher du soleil, la descente devra se faire dans la pénombre... En soirée, le son de la musique venant d’un bateau pique notre curiosité et nous faisons enquête. Il s’agit d’un petit navire transformé en bar flottant! Les quelques jeunes présents dans la baie y sont tous, ainsi que leurs parents et navigateurs de tous âges, et tous semblent faire la fête autant que les autres. Francis et moi, pour une deuxième fois dans la journée, prenons un vilain plaisir à observer le comportement animal dans sa plus simple expression : la chasse! « Dure la vie de marin » certains diront, surtout ceux qui sont loin des côtes et de compagnie féminine... Le rhum des Caraïbes animent certainement ce spectacle et on se croit tout d’un coup dans un party de réels pirates, avec du hip hop dans le tapis comme seul anachronisme! Assez d’étude animale pour la journée, on doit se coucher pour plonger demain! Peter Island a aussi une baie protectrice qui sera désignée comme notre lieu d’ancrage. Un resort à 4000 $ par semaine par personne s’y trouve aussi, ainsi qu’un Yacht Club et un centre de plongée. Malgré le fait que nous ne payons rien du tout pour s’y ancrer, nous explorons les différentes installations et profitons des effectifs manquants sur le bateau: douche d’eau chaude, eau fraîche pour nettoyer l’eau salée sur l’équipement de plongée, petit bar (plutôt cher, 7$ pour une Corona!), etc. Une plongée bien imprégnée dans la mémoire de Michel est selon lui un must dans cette région du globe. Il s’agit de l’épave du Royal Mail Steamship Rhone, un navire à vapeur de 300 pieds de longueur, qui s’est échoué le 29 octobre 1867. Le fait impressionnant est qu’il a été un des premiers de cette époque à être fabriqué en acier (ce qui explique qu’il soit toujours là 144 ans plus tard) mais qu’il gardait encore le look des voiliers à vapeur en bois. Il fût cassé en deux alors qu’un ouragan fit entrer l’eau dans la cale et ainsi fît exploser la chaudière à charbon qui fonctionnait à pleine vapeur. L’épave s’explore donc en 2 étapes, la proue (devant) et la poupe (arrière). Il y a beaucoup à voir ici, l’épave est encore intacte et parfaitement reconnaissable (pas toujours le cas pour de si vieux navire!) et le corail a eu raison de la structure après tant d’années, ce qui remplit la place de vie marine. Murène verte géante, langoustes, barracudas, crabe géant, oursin, immense corail noir (en voie de disparition) et des milliers de poissons de toutes les couleurs. Une scène de film y a d’ailleurs été tournée, The Deep (1977); à regarder pour ceux qui veulent avoir une idée de l’ambiance qui y règne! Magnifique plongée, à conseiller. Nous nous déplaçons vers la baie de Manchioneel, sur Cooper Island. D’autres épaves gisent sur les fonds marins des îles avoisinantes, dont le Marie L & Pat, le Fearless & Willie T et 2 autres qui ne sont pas dans notre guide car trop récentes. C’est toujours impressionnant de se promener aux travers de ces carcasses avec l’effet d’apesanteur propre à la plongée sous-marine, de se passer la tête à travers un hublot, ou de tenir la barre dans la cabine du capitaine, tout en étant accompagnés par des créatures marines qui n’appartiennent généralement pas à ce genre d’environnement créé par l’humain. On ne sait pas trop si on doit se sentir à notre place ou pas. Une courte exploration de Salt Island nous fait découvrir qu’elle est désertée et comporte tout plein de petites cabines de pêcheurs abandonnées. Jadis, les habitants de cette île ont reçu l’émancipation de l’Angleterre pour avoir secouru les naufragés du RMS Rhone, et ne doivent qu’un sac de sel à la Reine par année (pas de taxes). Paradis fiscal délaissé?... Des tombes sommaires, un quai aux sections manquantes, des coquillages disposés sur des tables de bois érodées par le sel et le vent, mais pas âme qui vive, à part un coq qui doit se sentir seul. Des visiteurs doivent être plutôt rares dans les profondeurs de l’île, mais certains voiliers ou catamarans viennent visiter la plage et son récif avec masque et tuba. Francis et moi optons pour la grimpe ardue du sommet qui porte un phare de navigation à son sommet, le tout effectué en gougounnes et en maillot de bain, évidemment... Nos périples tirent déjà à leur fin et nous nous dirigeons vers un must touristique des BVI, The Baths, un cap composé d’immenses blocs de roche empilés qui forment un labyrinthe naturel. Plutôt intéressant au niveau photographique car les rochers, le sable et l’eau qui nous baigne les pieds offrent tous de beaux jeux de pénétration de lumière, de réflexions, de perspectives troublantes, etc. Seul point désolant, commun à tous lieux aussi forts en attraction touristique, l’affluence de touristes! Nous sommes arrivés près de 2 heures avant que ceux-ci ne débarquent en masse et avons tout de même pu profiter des lieux et prendre quelques clichés... Durant les jours suivants, nous avons continué les plongées avec Michel et Marcel de NaMar. Autour de Great Dog Island se trouvent une épave d’un petit avion et une cheminée naturelle (le site se nomme The Chimney et Jacques Yves Cousteau lui-même y a plongé, notant la variété d’éponges blanches que nous avons d’ailleurs aperçues). Voilà, fini pour la plongée! Seize au total, de quoi porter mon log book au nombre cumulatif de 440 plongées. J’ai déjà hâte à la 441ème! Le retour vers Road Town s’est entrepris sans problème, à part un petit grain (mini tempête) qui nous a bousculé pendant 3 grosses minutes en approchant Tortola Island, qui semble constamment ennuagée à force d'absorber toute l'humidité venant de l'Océan Atlantique. Un bon souper avec Brigitte, Michel, Nancy et Marcel au resto Pusser's, qui sert des spécialités locales pour clore ce séjour trop vite terminé! Le lendemain moi et Francis prenons le taxi à travers les routes sinueuses de Tortola et Beef Island pour aboutir à l'aéroport ou un minuscule avion nous transportera jusqu'à Saint-Martin. Le même trajet que nous avons pris 12 heures de navigation nocturne n'aura nécessité que 35 minutes en avion! À peine avons-nous le temps de courir au bout de la piste pour voir partir un ou deux avions et recevoir une bonne dose de sable, que nous devons sautez dans notre prochain avion vers…. Toronto. :( Wow, c'est la première fois je pars en « voyage » pour une si courte durée! Ça passe trop vite, pas eu le temps de faire le 1/10 de ce que j'aurais voulu faire dans chacune de ces îles et villes. Pas assez mangé de bouffe locale, pas assez parlé aux locaux, pas assez fait de plongée, pas assez fait de voile, pas assez bronzé! Mais mieux vaut un échantillon de tout ça que rien du tout. Et c'est pourquoi je veux remercier grandement Brigitte et Michel de nous avoir accueillis sur le Sea Kite et d'avoir fait tout en sorte que l'on profite au maximum de notre temps alloué. C'était d'une grande générosité et j'espère que nous avons été d'aussi bonne compagnie qu'ils ont été des hôtes incroyables. Merci pour les multiples détours, repas, considérations et sacrifices, aussi petits qu'ils ont pu être, que vous avez fait pour nous. Je parle pour Francis en disant qu'on vous envoie des 88 et des 73! Bonne continuité dans votre trajet, on vient vous voir quand vous êtes rendus aux Îles Cayman?! Suivez le voyage de Brigitte et Michel à bord du Sea Kite sur leur blog http://seakite.blogspot.com.
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